Summary: | DSTS = Diplôme supérieur en travail social
Cette recherche, enracinée autour d'une pratique professionnelle d'une dizaine d'années, vise à comprendre les freins à l'intégration pour les personnes "malades mentales", une fois le logement autonome acquis. Pourquoi la fin de leur exclusion spatiale ne leur donne pas, pour autant, une place à part entière dans la société ? Une première partie descriptive s'attache à montrer comment ce problème émerge dans un contexte de désinstitutionnalisation des Centres Hospitaliers Spécialisés et de crise du logement. L'auteur pointe les intrications complexes entre les dimensions sociales et personnelles de l'habitat. Elle tente également de déconstruire les notions de maladie mentale, d'handicap et d'intégration et propose l'hypothèse selon laquelle l'accès au logement peut être un facteur d'intégration pour les personnes "malades mentales" de retour dans le milieu social, celles-ci restant néanmoins assignées à une place de "malade" leur ouvrant des droits spécifiques,protecteurs mais stigmatisants. L'enquête, par entretiens, auprès de dix personnes locataires, usagers de la psychiatrie, cherche à observer leur sentiment d'intégration et leurs pratiques sociales. Elle fait apparaître des temps fortement différenciés - selon qu'on occupe ou non un emploi - l'importance d'avoir un espace privé, la logique des filières pour accéder au logement, des risques d'enfermement et d'isolement dans les appartements individuels. L'auteur a également observé un relâchement des liens familiaux, l'entrée dans de nouveaux réseaux de pairs, des différents positionnements quant au rôle de malade, un effet très fortement stigmatisant de la maladie mentale. Les participations électorales et associatives sont très réduites, renvoyant à un certain désengagement pour le collectif, une certaine dé-responsabilisation qui interroge le sentiment d'appartenance vis-à-vis du corps social. L'interprétation des données propose trois pistes d'analyse, à partir de la question transversale de l'intégration. La première montre que le logement, à lui seul, n'entraîne pas les autres aspects de l'intégration, l'emploi restant le modèle dominant d'appartenance au corps social. La seconde, à partir du constat du déclin du "travail grand intégrateur" affirme qu'un nouveau modèle se construit : être intégré aujourd'hui, c'est pouvoir se porter soi-même et faire partie d'un réseau. Le logement reliant peut y contribuer. Neanmoins, ces deux modèles successifs d'intégration sont loin d'être toujours favorables aux "individus incertains". L'accès au logement est ensuite appréhendé par l'auteur comme une tentative de normification, une stratégie pour paraître conforme dans une société qui "intègre" la différence en l'effaçant. Intégration, assimilation, différenciation ou normalisation ?
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